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L'humidité est un problème qui concerne, en France mais aussi en Europe, plus de 60 % de l'immobilier ancien, et environ 45 % du parc immobilier global. C'est un problème complexe car les causes en sont multiples, ce qui subordonne toute recherche de solution à leur identification préalable.
Pierre MAINillustration BRGM – argiles.fr
H2o – avril 2001
L'humidité, étant présente dans l'air ambiant, est normalement présente
dans les maisons, et dans les matériaux qui la constituent. L'excès
d'humidité a été pendant longtemps, avec le défaut d'aération, la
pathologie principale des logements insalubres. Leur diminution a
permis d'améliorer les conditions de vie et la santé de leurs
occupants, mais les causes accidentelles d'humidité demeurent, et sont
fort nombreuses.
Les murs respirent
Les matériaux naturels, comme la pierre, la brique, le bois, ont besoin d'oxygène pour vivre. La respiration naturelle des murs nécessite un état d'équilibre hygroscopique, c'est-à-dire qu'il doit sortir du matériau autant d'eau par évaporation qu'il n'en entre par absorption. Si la surface d'évaporation, pour différentes raisons, devient insuffisante, l'équilibre entre l'intérieur et l'extérieur est rompu et l'humidité apparaît sur les murs. Si beaucoup de constructions anciennes subsistent encore, c'est parce qu'elles étaient en état d'équilibre hygroscopique. L'humidité est néanmoins un vieux problème, comme en témoignent les ouvrages d'architectures et les manuels d'économie domestique. Autrefois, toutes les maisons étaient humides après leur achèvement ; il était donc conseillé d'accélérer la dessiccation des mortiers par le chauffage et l'aération. Des méthodes plus radicales, et non sans danger, étaient pratiquées, comme le système de Guyton-Morveau. Il consistait à fermer les fenêtres, et mettre dans des terrines placées sur un feu doux quelques mesures de salpêtre brut et de sel de mer sec que l'on arrosait de vitriol avant de prendre la fuite. Certains remèdes étaient pires que le mal, comme la pose de feuilles de plomb laminées pour éviter les remontées capillaires. Clouées au mur et recouvertes d'une tapisserie, elles en bloquaient la respiration. De nos jours, des installations comme les plaques de polystyrène isolant aluminisé, les plinthes en ciment, les doubles cloisons mal conçues ou mal ventilées, les revêtements de façades étanches et asphyxiants, contribuent à provoquer un déséquilibre hygroscopique.
Cependant, la majorité des situations provient non de causes endogènes, c'est-à-dire liées à un choix ou une réalisation de l'occupant, mais de causes exogènes, c'est-à-dire plus ou moins accidentelles et indésirables.
LES CAUSES de l'HUMIDITÉ
Quand l'humidité vient du ciel
Les sources sont nombreuses : une toiture-terrasse sans aucune pente, recouverte d'un simple imperméabilisant de surface ou fissurée, des tuiles de toiture devenues poreuses, un joint de faîtage dégradé, une crevasse dans le solin d'une cheminée, un élément saillant de façade en pierre gélive faisant apparaître une petite faille à la jointure, des chêneaux, gouttières ou descentes d'eau bouchés ou mal raccordés. Autant de causes pour que l'eau s'infiltre de façon plus ou moins discrète, plus ou moins rapide. Pour être complet, il faut aussi mentionner, dans les appartements, le vidage de la baignoire, rarement contrôlé car celle-ci est encastrée, et parfois sans trappe de visite. Un joint défectueux, un simple suintement resteront pendant des mois indiscernables aux propriétaires de la baignoire, sauf, un jour, pour le voisin du dessous.
Quand ces dégâts venus d'en haut apparaissent, ce n'est pas avec violence (dans ce cas c'est une inondation) mais par diverses manifestations : plafond humide par endroits, peinture écaillée avec dépôts blanchâtres, taches brunes sur le papier peint, effritement du plâtre. L'intervention implique de remonter à la source pour savoir où et comment il faut agir : toit, gouttière, canalisations. Ce sont des réparations classiques. Elles deviennent plus délicates si l'humidité provient d'un mur dégradé dans sa partie haute. Des fissures apparentes doivent être rebouchées, mais il faudra auparavant savoir si elles proviennent d'un défaut du mur ou d'une déformation évolutive. Le traitement (imperméabilisant de surface, produit d'imprégnation, hydrofuge de masse incorporé à un mortier bâtard, peinture spéciale micro-poreuse, crépi synthétique), quel qu'il soit, devra toujours laisser le mur respirer. Et sur un toit-terrasse, il faudra procéder à une application à chaud de complexes bitumineux, après examen du matériau de toiture.
On sait qu'il existe des matériaux traditionnels poreux par nature, et que d'autres le deviennent par vieillissement, mais on sait moins que le béton, matériau moderne, vieillit mal. De par sa structure lacunaire, le béton est naturellement poreux, sensible aux conditions climatiques et à la pollution atmosphérique. Celles-ci modifient leur pH, qui devient acide, accélérant la corrosion des armatures d'acier. En s'oxydant, elles gonflent et provoquent des fissures. Après 15-20 ans, il est rare qu'un béton soit intact.
Quand l'humidité vient du sol
C'est le problème des remontées capillaires. Il faut savoir que les murs contiennent un volume d'eau, variable selon les matériaux, et qui peut atteindre 20 à 30 %. Ce phénomène est naturel, et signifie que chaque mètre cube de maçonnerie permet l'ascension de 300 kg d'eau ! Soit une remontée capillaire, ou humidité ascensionnelle, très importante. Les remontées capillaires sont généralement alimentées par les terrains rétenteur d'eau, la hausse du niveau des nappes phréatiques, les modifications de l'environnement par le développement des zones urbaines, la suppression des fossés ; elles sont aggravées par les sous-sols mal ventilés. Elles sont fréquentes dans les maisons qui ont subi une ou plusieurs inondations. La caractéristique de ces remontées est un taux d'humidité décroissant du bas vers le haut. Les signes sont également caractéristiques : papier qui se décolle à la base des murs, apparition de salpêtre, enduit qui devient farineux, pourrissement des moquettes, champignons microscopiques. Le problème est qu'il faut souvent traiter l'extérieur et l'intérieur.
À l'extérieur, si possible, un drainage le long des murs de fondation, complété d'une évacuation vers un point bas, sera une solution très efficace d'assèchement. On peut aussi traiter les fondations et bas de murs avec des produits bitumineux, que l'on préfèrera aux isolants en polystyrène.
À l'intérieur, une méthode consiste à créer une bande d'étanchéité en injectant tous les 15 ou 20 cm (au dessus de la zone atteinte) un produit hydrofuge au moyen de perforations en biais. On peut aussi étaler une barrière epoxy, mais celle-ci étant étanche, elle risque de compromettre l'équilibre hygroscopique.
Autrefois, à la suite d'une inondation, on préconisait de laver les murs à l'eau claire, afin d'enlever l'humidité visqueuse, source de moisissures, puis, après évaporation, de les passer au lait de chaux. Il suffisait ensuite de chauffer les pièces en établissant une forte ventilation. Contre les remontées capillaires, on conseillait une couche de ciment romain de Pouilly ou l'application de bitume.
La condensation
Ce phénomène naturel est provoqué par le contact d'un air ambiant chargé de vapeur d'eau avec une paroi froide. L'air ne peut contenir qu'une certaine quantité de vapeur d'eau ; dès que la limite de saturation est atteinte, l'eau se condense, c'est-à-dire que l'air humide et chaud se transforme en eau. C'est le phénomène classique observé sur le miroir de la salle de bains lorsque la pièce a été chauffée et la baignoire remplie pour prendre un bain. L'humidité de condensation tend à se développer parce que nous produisons plus de vapeur d'eau dans les logements que par le passé, nous chauffons plus et nous aérons moins. Ainsi, dans un logement bien chauffé, la présence de fenêtres étanches en PVC ou en aluminium peut aggraver la condensation. Celle-ci concerne essentiellement les pièces les plus chargées en vapeur d'eau, comme la cuisine ou la salle de bains. L'aération et la ventilation sont les meilleurs moyens de lutter contre la condensation. La présence de grilles d'aération est indispensable, mais souvent, la tendance au calfeutrage fait que ces grilles sont obturées. Le système le plus efficace est aujourd'hui la VMC (ventilation mécanique contrôlée) qui permet de renouveler l'air de l'ensemble d'un logement. De plus en plus adoptée dans la construction neuve, la VMC est également disponible pour la rénovation.
Une humidité de condensation peut également apparaître dans les maisons inhabitées ou dans les pièces non chauffées, elle se dépose généralement sur les parties froides : murs extérieurs, marbres de cheminées, meubles, autant de "ponts thermiques". Il est donc préférable d'entretenir une température minmale de 12 à 15 °C dans les pièces inhabitées.