Dossier de Martine LE BEC et Nicole MARI   |
||
August 2002 | ||
Page 9 sur 10
Pour une dynamique de concertation Nord-Sud-Sud solidaire et mutuellement profitable
Chedli FEZZANI Le programme Aquifères
Parmi ses programmes de gestion durable, l'OSS a entre autre lancé le programme "Aquifères des grands bassins". Centré autour de la gestion concertée des ressources en eau non renouvelables de la zone sahélo-saharienne, ce programme vise à favoriser la mise en place, par les pays, de stratégies et d'outils communs de gestion concertée des aquifères partagés. Il s'est initialement concentré sur les deux grands systèmes nord-africains : le système aquifère du Sahara septentrional (SASS), partagé par l'Algérie, la Tunisie et la Libye, et couvrant une superficie d'un million de km2 et le système aquifère nubien, plus connu par sa superficie (2 millions et quelques de km2) et partagé entre la Libye, l'Égypte, le Soudan et le Tchad. L'observatoire a notamment publié une monographie du système nubien à l'appui des diverses recherches effectuées pendant vingt ans par l'Université de Berlin. Son travail s'étend aujourd'hui aux autres aquifères sahélo-sahariens : le bassin des Illumenden, partagé par le Niger, le Nigeria et le Mali, ou encore le bassin côtier sénégalo-mauritanien, essentiel pour le développement agricole local. Une conscience nouvelle de bassin partagé
"La connaissance de ces systèmes, notamment subsahariens était restée très vague, souvent tronquée aux limites politiques des États et globalement très éparpillée", explique Chedli Fezzani, "Les informations relevaient aussi le plus souvent des compagnies pétrolières ou minières (comme cela a été le cas pour le bassin Taoudani, partagé entre l'Algérie, le Niger et le Mali, et longtemps exploité pour l'uranium) ; mais elles ne remontaient jamais jusqu'aux États ou institutions nationales concernés pour des projets de développement". En comblant ces lacunes, les projets développés dans le cadre de l'OSS leur donne l'occasion de se rapprocher et de se concerter. Ils contribuent par là à l'émergence d'une conscience de bassin partagé. L'effort permet aussi in fine de stabiliser les populations de ces régions – leur milieu naturel, condition première d'une politique de développement maîtrisé. Un partenariat Sud-Sud solidaireInitialement fondée sur l'idée du partenariat Nord-Sud, l'approche de l'OSS s'ancre aujourd'hui dans une dynamique de concertation Nord-Sud-Sud "solidaire" et "mutuellement profitable". L'action très forte de l'Observatoire en Afrique du Nord s'étend d'ores et déjà sur une large partie de l'Afrique de l'Ouest ; mais elle va aussi progressivement se développer en Afrique de l'Est, à l'appui notamment d'une coopération plus active avec l'IGAD, l'Autorité Intergouvernementale pour le Développement (regroupant Djibouti, l'Éthiopie, l'Érythrée, le Kenya, la Somalie, le Soudan et l'Ouganda). L'organisation a par ailleurs été sollicitée par d'autres pays ou groupes de pays intéressés par le modèle de Suivi-Évaluation développé par conjointement développé avec le CILSS, dont la Chine ou encore le GRULAC, Groupe de pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Sur la problématique de l'eau en Afrique, le modèle de gestion des aquifères mériterait sans doute d'être aussi dupliqué sur les eaux de surface. "Le Nil, le Niger, le Zaïre ou le Zambèze, l'Afrique dispose d'important potentiels de développement, mais là encore très mal maîtrisés", constate Chedli Fezzani, "Des commissions existent, qui sont insuffisamment opérationnelles ou qui manquent de moyens. Il faudrait les renforcer, adapter leurs structures. C'est là tout le drame des institutions scientifiques africaines, démesurément rigides et figées. Fondées il y a vingt ans pour combler une insuffisance nationale, la majorité d'entre elles sont aujourd'hui sclérosées. Y remédier supposerait néanmoins de réformer toute une ancienne classe de managers et d'imposer comme niveaux critère d'excellence, la compétence et l'engagement d'être au service d'une autre vision de l'Afrique telle que celle prônée par l'UA et le NEPAD". Le propos est clair et sans détour. .
|