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Sécheresse : Comment surmonter ce défi climatique ?

Mots clés : sécheresse, défi climatique, les réponses à moyen et long termes
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SÉCHERESSE
Comment surmonter ce défi climatique ?

L’Académie des technologies partage l'avis de deux de ses membres, Bernard SAUNIER et Bernard TARDIEU, sur la question "Sécheresse : Comment surmonter ce défi climatique ?". À travers cette note, les auteurs cherchent à définir une stratégie à long terme pour la France afin de faire face à cette situation climatique.

Bernard SAUNIER
Bernard TARDIEU
Académie des technologies

H2o – août 2022

 

Face aux vagues caniculaires de cet été, la France, ainsi que toute l’Europe, connaît actuellement une période de sécheresse extrême. Pourtant, les experts constatent que la quantité d’eau se déversant annuellement sur la France serait à peu près la même qu’auparavant. Cependant, les épisodes pluvieux sont plus intenses et les périodes de sécheresse plus nombreuses et plus longues, en fonction de la zone géographique. Il nous faudrait ainsi une stratégie concrète sur le long terme pour assurer un approvisionnement continu en eau, quelles que soient les conditions météorologiques.

La solution couramment évoquée, et âprement défendue par le monde agricole, est l'augmentation des capacités de stockage. Dans les pays arides, la capacité de stockage des barrages-réservoirs est un atout majeur. Il se peut que ces barrages ne se remplissent qu’une fois tous les trois ou quatre ans, mais lorsque des pluies intenses surviennent, la capacité de stockage est en place pour retenir la précieuse ressource. C’est le cas au Maroc et en Algérie, mais également en Espagne qui dispose de la sorte d’une capacité de stockage cinq fois supérieure à celle de la France. Toutefois construire de nouveaux barrages-réservoirs demanderait dix à quinze ans en tenant compte des études, des contraintes environnementales, des expropriations à opérer et des recours devant les tribunaux qui en résulteraient. Aussi, si cela peut devenir indispensable dans certaines zones, ne serait-ce que pour contrôler les inondations dans des villes aval, la solution ne sera jamais facile. Une autre option subsiste : c'est celle de l'augmentation des capacités de stockage des barrages-réservoirs déjà existants. Cette solution s'avèrerait à la fois rapide et efficace car nécessitant peu d'études complémentaires, peu d'autorisations et n'empiétant pas sur les terres agricoles environnantes (déjà acquises). Dans certains cas, il s'agira de rehausses sur les déversoirs fixes, et dans d'autres cas de rehausses fusibles. Cette dernière technique, française faut-il préciser, est déjà utilisée en France et ailleurs dans le monde depuis près de trente ans. Elle permet d'augmenter de 20 à 50 % la capacité de stockage d'un réservoir, au prix d'une faible rehausse compte tenu de l'effet de surface.

Cette première option ne doit pas nous faire omettre une seconde : la réalimentation artificielle des nappes phréatiques. Il s'agit là d'un sujet majeur en France où nous continuons de gérer nos nappes passivement, en suivant la baisse et la remontée des niveaux d’eaux, mais sans chercher à "aider" leur remontée, par exemple aux moments de débits des fleuves importants. À l'issue des grands épisodes pluvieux, toutes nos nappes devraient ainsi être à leur niveau maximal. Est-ce le cas ? Non, et cela bien que l'option soit aussi un moyen de prévention des inondations. 

En milieux urbains, une autre option devient une orientation forte des politiques d'aménagement : il s'agit de la rétention des eaux pluviales. Cette dernière se développe à grande échelle en Californie, où la pression hydrique par habitant est déjà au moins deux fois supérieure à la nôtre. Cela consiste à aménager un stockage des eaux pluviales partout où c’est possible : à la parcelle pour les usages locaux des parcs et jardins ou le nettoyage des voieries, et également dans des dépressions humides aménagées en zones de loisirs.

Enfin, un autre défi majeur pour la France est celui de la réutilisation directe et/ou indirecte des eaux usées. Aujourd’hui, on en parle. Hier, on le faisait sans en parler… Peu de gens se rendent compte qu'elle est néanmoins déjà pratiquée, y compris en France, seulement sans le dire. Ainsi l’eau distribuée depuis Croissy-sur-Seine, à l’aval de Paris, présente-t-elle au moins quatre mois par an une proportion d'eaux usées traitées en provenance des stations d’épuration de Colombes, Valenton ou autres, situées en amont. Il en va de même en Bretagne où, en l'absence de nappe phréatique, le recours aux eaux de surface s'impose.

Nous n'évoquerons pas la question, ultime, du dessalement de l'eau de mer ou des eaux saumâtres, heureusement non encore d'actualité en France. Cela étant, devons-nous nous rappeler que la meilleure eau est celle que nous ne consommons pas. ▄ 

 

 Les auteurs
Bernard Saunier est membre de l’Académie des technologies et ancien président de Lyonnaise des Eaux Services Associés et de SAFEGE (aujourd'hui Suez Consulting & Engineering). Bernard Tardieu est vice-président du pôle Énergie à l'Académie des technologies, et président d’honneur de Coyne et Bellier.

Académie des technologies – L’Académie des technologies est un établissement public administratif national placé sous la tutelle du ministre chargé de la recherche et sous la protection du Président de la République. Elle compte plus de 300 membres élus, issus d’horizons variés qui reflètent la diversité des technologies. Son organisation assure la collégialité et la pertinence de son action dans l’exercice de ses missions : les avis et les rapports, orientations générales et programme d’action, sont votés en assemblée plénière. Quatre idées fortes gouvernent l’action de l’Académie pour une appropriation toujours plus raisonnée et collective des technologies : progrès, sens de l’intérêt général, écoute, anticipation. Depuis janvier 2022, l’Académie des technologies est présidée par Denis Ranque, ancien PDG de Thales et président d’Airbus.