Eau et pauvreté |
Eau et pauvreté, l'Afrique en train de pérécliter
l’interview de Medhi LAHLOU
Medhi Lahlou, vous enseignez depuis une vingtaine d’années l’économie des pays en développement et vous intéressez à ce titre à la question de l’eau depuis une dizaine d’années. Quel est, selon vous, le défi majeur que les économies en développement ont à surmonter, dans le monde et de manière plus spécifique en Afrique ?
Le défi majeur est celui de la pauvreté. Le problème va s’accentuer
dans les pays pauvres d’Afrique, et même dans les moins pauvres. Du
fait aussi des questions d’insécurité, notamment au Moyen-Orient, il y
aura de moins en moins de financement disponible pour faire face à la
pauvreté. Ainsi les autorités américaines viennent de décider que sur
les 18 milliards de dollars devant être affectés à la reconstruction de
l’Irak, 3 milliards seront prioritairement affectés à la sécurité. Le
rapport des Nations unies pour la population mondiale (UNPFA) tire la
sonnette d’alarme, de même que le récent Forum mondial urbain : un
milliard de personnes vivent aujourd’hui dans des bidonvilles, ce
chiffre devrait doubler d’ici à 2020. Pensez-vous que la situation soit pire en Afrique que dans d’autres continents, l’Amérique latine ou l’Asie du sud-est ?
Oui, la situation est surtout dramatique en Afrique. Elle s’est en
revanche nettement améliorée en Amérique latine ainsi qu’en Asie, à
l’exception de certaines poches de pauvreté qui subsistent ici et là,
par exemple aux Philippines, dans certaines régions de l’Indonésie, au
Bangladesh ou encore – ici pour des raisons évidentes de sécurité – au
Pakistan et en Afghanistan. Mais s’agissant de l’Afrique, c’est une
énorme partie du continent qui est aujourd’hui en train de péricliter :
en réalité toute l’Afrique sub-saharienne, depuis la Mauritanie
jusqu’au Congo-Kinshasa, et même au-delà, jusqu’à la frontière nord de
l’Afrique du Sud. À des décennies de laxisme et de détournement en
matières politique et économique, s’ajoutent des problèmes d’insécurité
qui font que les investissements directs étrangers sont largement
insuffisants. Partant de là, les solutions sont difficiles. Y a-t-il cependant des éléments positifs ?
Une coopération internationale s’est mise en place, cette
coopération a été initiée et reste encore trop largement du domaine des
ONG internationales. Un autre élément positif est la prise de
conscience de cette situation, une prise de conscience à laquelle le
système des Nations unies a fortement contribué.
|
|