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La prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation

Rapport d’enquête parlementaire

Mots clés : paysages, eau, biodiversité, plantes invasives, conséquences, gestion, prévention
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Titre La prolifération des plantes invasives et les moyens pour endiguer cette situation
Auteurs Nadia ESSAYAN
Patrice PERROT
Éditeur Assemblée nationale

Rapport n° 4391
Sortie juillet 2021

Internet

ASSEMBLÉE NATIONALE
FRANCE

1 379 espèces végétales exotiques sont recensées en France, dont 1 à 10 % deviennent invasives.
En outremer, 60 espèces parmi les 100 espèces les plus envahissantes sont présentes dans au moins un département.
En métropole, chaque département compte en moyenne 6 espèces envahissantes de plus tous les dix ans depuis 1979.

 

La France est particulièrement touchée par la prolifération des plantes invasives et ce phénomène tend à s’amplifier, aussi bien en métropole, en raison notamment de sa situation géographique et de son climat tempéré, qu’en outremer qui concentre 80 % de la biodiversité terrestre et maritime de notre pays et où est présente plus de la moitié des espèces les plus envahissantes. Outre les coûts économiques engendrés par les pertes de production, les coûts de contrôle, d’éradication, de suivi, de restauration ou encore la perte de tourisme estimés à 38 millions d’euros par an pour les espèces exotiques végétales et animales, la prolifération d’espèces invasives est aujourd’hui considérée comme la deuxième cause d’extinction des espèces par le GIEC.

Des conséquences sous-évaluées – Les plantes invasives ont des conséquences sous-évaluées sur la biodiversité, le fonctionnement des écosystèmes mais aussi sur la santé humaine. S’agissant de la perte de biodiversité, des extinctions locales et globales sont dues aux impacts des plantes, qu’ils soient directs (compétition des espèces) ou indirects (émission de composés biochimiques qui empêchent le développement d’autres organismes). L’altération du fonctionnement des écosystèmes résulte pour sa part de la perte de biodiversité ou du changement de la chimie du sol ou de l’eau. Les plantes envahissantes représentent un coût économique important parmi lesquels on retrouve les pertes de production, les coûts de contrôle, d’éradication, de suivi, de restauration ou encore la perte de tourisme à la suite de la dégradation du paysage. Ainsi, par exemple, l’arrachage mécanique et manuel de la jussie à grandes fleurs (Ludwigia grandiflora) sur les berges de l’Adour, dans les Landes, a coûté 441 000 euros entre 2016 et 2020. Par ailleurs, certaines plantes constituent un risque important pour la santé humaine comme l’ambroisie à feuilles d’armoise, du fait des propriétés allergisantes de son pollen, ou la berce du Caucase qui peut provoquer des brûlures cutanées par contact. 

Une gestion difficile et onéreuse – Il est difficile, voire quasiment impossible, d’éradiquer une espèce envahissante une fois installée. Par ailleurs, les techniques de gestion ont souvent un coût élevé et sont difficiles à mettre en œuvre. Si l’utilisation des produits phytosanitaires doit être évitée, dans une démarche de limitation des usages, les procédés manuels ou mécaniques sont long et nécessitent une main-d’œuvre importante. Ces difficultés sont encore accrues en milieu aquatique. Aussi, du fait des coûts et des moyens qui restent limités, les rapporteurs recommandent de concentrer les efforts de gestion sur les milieux les plus exposés, bien qu’à ce jour, les acteurs locaux ne disposent d’aucune cartographie soulignent-ils. Enfin, la gestion des déchets constitue une difficulté en soit. Le transport constitue un risque de dissémination élevé dans des milieux non infestés. Quant à la valorisation (compostage, incinération, méthanisation), elles nécessitent des équipements permettant une gestion à grande échelle et adaptée aux caractéristiques des espèces (par exemple, la renouée du Japon nécessite une méthanisation à très haute température pour une durée d’au moins huit mois).

Prévenir plutôt que gérer – Le coût économique de la prévention et la biosécurité sont inférieurs au coût de la gestion, lui-même très inférieur aux dommages économiques provoqués par les plantes invasives. C’est à ce titre que les auteurs du rapport préconisent une action à deux niveaux : prévenir l’introduction et la dissémination des plantes invasives plutôt que de les gérer et les gérer pour ne pas en subir les dégâts.

 

23 RECOMMANDATIONS POUR :

I. ENCOURAGER LA RECHERCHE RELATIVE AUX INVASIONS BIOLOGIQUES

1. Financer un programme de recherche-action INVABIO 2.
2. Encourager la diffusion des connaissances et des expériences de gestion.

II. FAVORISER LA PRÉVENTION DES INTRODUCTIONS

3. Mener des actions de communication et de sensibilisation à l’échelle nationale sur les risques associés aux invasions biologiques.
4. Promouvoir des actions sur le terrain qui permettraient à un public non professionnel d’être sensibilisé aux risques posés par les plantes invasives.
5. Renforcer les moyens humains de contrôle des douanes et du service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (SIVEP) pour mettre en place des protocoles de biosécurité efficaces.
6. Intégrer la question des invasions biologiques à toutes les politiques publiques en désignant un référent dans toutes les collectivités.
7. Établir un schéma clair de gouvernance national et régional afin de définir les acteurs responsables de la lutte contre les plantes invasives.
8. Renforcer le système d’information pour la détection et la surveillance des invasions biologiques.
9. Inciter à la participation les citoyens pour en faire des acteurs du signalement.
10. Encourager et sécuriser le déploiement du label "végétal local".
11. Introduire une obligation de surveillance des plantes invasives par le maître d’ouvrage pour tout chantier de travaux publics.
12. Faire des territoires insulaires une priorité nationale en renforçant les protocoles de biosécurité, en déployant des campagnes de sensibilisation et des financements d’urgence.
13. Faire évoluer les listes réglementaires de niveau 2 en outre-mer sur le principe de "tout est interdit sauf".

III. AMÉLIORER LA RÉACTIVITÉ ET LA COORDINATION DES POLITIQUES DE GESTION

14. Créer un fonds d’urgence pour intervenir rapidement contre les plantes invasives émergentes sur un territoire déterminé.
15. Multiplier par dix les crédits de la sous-action 5 de l’action 7 du programme 113 "Paysages, eau et biodiversité".
16. Dans le cadre de l’action 02 du programme 362 "Biodiversité" du plan de relance, encourager les services de l’État à lancer des appels à projets visant spécifiquement les espèces exotiques envahissantes.
17. Promouvoir le financement des opérations de gestion des plantes invasives par l’obligation de compensation des atteintes à la biodiversité.
18. Simplifier et uniformiser les procédures de demande de subventions pour les organismes de protection de l’environnement.
19. Prioriser les actions de gestion dans les documents d’orientation et pour mobiliser les acteurs de terrain.
20. Promouvoir les chantiers d’insertion pour la gestion des plantes invasives, en ayant recours aux entreprises de l’ESS, aux territoires "zéro chômeur", au service civique et aux personnes condamnés travaux d’intérêt général et inciter à la signature de contrats d’insertion pour les demandeurs d’emploi ou bénéficiaires du RSA dans des structures publiques ou privées qui se consacrent aux traitements des plantes invasives.
21. Encourager le traitement différencié des déchets issus des espèces exotiques envahissantes dans le cadre d’un programme de lutte, notamment en traitant les déchets pour en extraire de l’énergie (biomasse), en permettant le compostage, la méthanisation ou l’extraction de molécules d’intérêt issues de ces espèces.
22. Dresser un état des lieux de la gestion des plantes invasives sur les terres en jachère.
23. Dresser un état des lieux de l’obligation d’entretien et de gestion des plantes invasives sur les cours d’eau privés.