Magazine H2o | Les espèces de poissons les plus menacées sont les moins étudiées | Brèves - Monde

Dessin de tracé de fleuve

Accueil > Brèves > Monde > Les espèces de poissons les plus menacées sont les moins étudiées


Recherche
Les espèces de poissons les plus menacées sont les moins étudiées

Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
Dossier de
la rédaction de H2o
  
23/08/2024

Les poissons de récif les plus menacés sont les plus ignorés par les scientifiques et le grand public. Tel est le résultat surprenant d’une équipe de scientifiques menée par un chercheur du CNRS, Nicolas Mouquet, directeur scientifique du Centre de synthèse et d'analyse sur la biodiversité (CESAB) de la FRB. Dans leur étude publiée dans Science Advances, ils ont mesuré l'intérêt humain à l’égard de 2 408 espèces de poissons de récif marin et ont révélé que la communauté scientifique serait davantage guidée par l'attrait commercial des poissons que par leur importance écologique. Le grand public semble, quant à lui, surtout influencé par les aspects esthétiques de certaines espèces (tels que le poisson scorpion, Pterois volitans, ou le poisson-mandarin, Synchiropus splendidus). Ainsi donc, les Blennies (Blenniidae) et les Gobiidés (Gobiidae), deux familles de poissons ne récoltent presque pas l’attention du public et peu d’effort de recherche. Ces poissons ont pourtant un rôle clé dans le fonctionnement des récifs, notamment comme nettoyeurs. De petite taille, ils sont essentiels dans la trophodynamique  des récifs, c’est-à-dire le transfert de l'énergie et de la matière fournies par les petites proies vers les consommateurs plus gros.

Pour arriver à ces résultats, les scientifiques se sont appuyés sur le big data : bases de données scientifiques, réseaux sociaux et statistiques de consultation de pages Wikipédia des différents poissons. Par exemple, les 2 408 espèces étudiées cumulent plus de 17 millions de vues sur Wikipédia, mais 50 % de ces vues ne concernent que 7 % des espèces ici considérées, et 20 % des vues seulement 1 % de ces espèces. Plus encore : 1 % des espèces étudiées cumulent presque 50 % des publications scientifiques.

Ces résultats mettent ainsi à jour les biais qui nuisent directement à la préservation des espèces marines ; à tel point que les auteurs sonnent aujourd’hui l'alarme. Ces derniers soulignent l'importance d’aligner l'intérêt humain pour la biodiversité avec les besoins de conservation et la santé des écosystèmes. Aussi, les chercheurs et chercheuses proposent d’initier des campagnes de sensibilisation afin d’attirer l’attention du public sur les espèces en danger et négligées. Enfin, ils suggèrent de mettre en place des programmes de recherche prenant en compte toutes les composantes des écosystèmes, pour une stratégie de préservation globale et non plus orientée par des impératifs commerciaux.

CNRS