Trois professeurs de l’Institut Weizmann clarifient le rôle du phytoplancton dans la régulation atmosphérique
Le
Dr Assaf Vardi, microbiologiste marin du département des Sciences du
végétal de l’Institut Weizmann, ainsi que le Pr Ilan Koren, qui
travaille sur la physique des nuages, et le Dr Yoav Lehahn,
océanographe, tous deux du département des Sciences de la Terre et des
planètes de l’Institut font progresser les recherches sur le rôle du
phytoplancton dans la régulation du contenu carbonique de l’atmosphère.
Lorsqu’on
parle de fixation globale du carbone, c’est-à-dire de pompage du
carbone de l’atmosphère et de sa fixation par photosynthèse dans des
molécules organiques, une mesure correcte est la clé de la réussite pour
comprendre ce processus. Selon certaines estimations, presque la moitié
du carbone organique dans le monde est fixée par des organismes marins
appelés phytoplancton. Ce sont des organismes photosynthétiques
monocellulaires qui constituent moins d’un pour cent de la biomasse
photosynthétique totale de la Terre. Petits, les organismes
phytoplanctoniques peuvent cependant être observés de l’espace : ils
prolifèrent en efflorescences pouvant s’étendre sur des milliers de
kilomètres carrés, formant sur l’océan des taches de couleurs que les
satellites peuvent repérer et mesurer. Ces efflorescences ont tendance à
grandir rapidement et à disparaître à l’improviste. Quelle quantité de
carbone une efflorescence de ce genre peut-elle fixer, et qu’arrive-t-il
à ce carbone quand l’efflorescence disparaît ? Cela dépend en partie de
ce qui tue l’efflorescence. Si elle est essentiellement mangée par
d’autres êtres vivants marins, par exemple, son carbone passe dans la
chaîne alimentaire. Si le phytoplancton manque de nourriture ou s’il est
infecté par des virus, le processus est plus compliqué. Des organismes
morts qui coulent peuvent emporter leur carbone au fond de l’océan. Mais
d’autres peuvent être dévorés à la surface de l’eau par certaines
bactéries qui emportent le carbone organique, puis le renvoient dans
l’atmosphère par leur respiration.
Les trois chercheurs, Vardi, Koren
et Lehahn, se sont demandé s’il est possible d’utiliser les données
satellites pour détecter les signes de la disparition d’une
efflorescence suite à une infection virale, possibilité que le Dr Vardi a
étudiée sur les efflorescences océaniques naturelles, et aussi en
laboratoire. Lors d’une récente croisière de recherche à proximité de
l’Islande, avec des collègues de l’université Rutgers et du Woods Hole
Oceanic Institute, les chercheurs ont pu recueillir des données sur les
interactions algues-virus et leurs effets sur les cycles du carbone dans
l’océan. En combinant les données satellites avec les mesures qu’ils
ont prises sur le terrain, ils ont pu, pour la première fois, mesurer
l’effet des virus sur les efflorescences de phytoplancton dans de vastes
zones de haute mer. Les chercheurs ont d’abord dû identifier un
sous-ensemble particulier de taches dans l’océan dans lequel des
processus physiques tels que des courants n’avaient pas affecté les
efflorescences, et ils ont pu observer uniquement les effets
biologiques. Puis, en suivant une efflorescence dans l’une de ces zones,
ils ont réussi à retracer l’ensemble de son cycle de vie. Ceci leur a
permis de quantifier le rôle des virus dans la disparition de cette
efflorescence particulière. Leurs conclusions ont été vérifiées à l’aide
de données accumulées lors d’une expédition de recherche dans le
Nord-Atlantique.
Les chercheurs ont estimé qu’une étendue d’algues
d’environ 1 000 kilomètres carrés – qui se forme en une ou deux semaines
– peut fixer environ 24 000 tonnes de carbone organique – comme le
ferait une surface identique de forêt tropicale. Du fait qu’une
infection virale peut rapidement éliminer une efflorescence entière, le
fait de pouvoir, depuis l’espace, observer et mesurer ce processus
pourrait largement contribuer à la compréhension et à la quantification
du renouvellement du cycle carbonique et de sa sensibilité aux
conditions de stress environnemental, parmi lesquelles les virus marins.
La
recherche du professeur Ilan Koren est financée par J&R Center for
Scientific Research et par la succession de M. Raymond Lapon. La
recherche du docteur Assaf Vardi est financée par Roberto and Renata
Ruhman (Brésil), Selmo Nussenbaum (Brésil), Brazil-Israel Energy Fund,
Lord Sieff of Brimpton Memorial Fund, European Research Council et la
succession de Samuel et Alwyn J. Weber.
Israël Science Info