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Dossier de la rédaction de H2o   |
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25/10/2024 | |
Générations Futures révèle, dans un rapport exclusif publié le 15 octobre, une surveillance de l’eau très insuffisante et une sous-estimation importante de la pollution des eaux en France. D’après les analyses officielles menées par les agences françaises, les métabolites, produits de dégradation des substances actives pesticides dans l’environnement, contaminent davantage les eaux potables que les substances elles-mêmes. Pourtant, bien que les autorités publiques soulignent fréquemment que "l'eau du robinet est l’un des aliments les plus contrôlés en France", l’ONG constate qu’en réalité peu de métabolites de pesticides sont intégrés dans la surveillance de l'eau potable au regard du nombre très importants de métabolites existants. De plus, lorsque cette surveillance est instaurée, elle intervient souvent tardivement, parfois après l'interdiction des substances actives. Générations Futures a aussi investigué pour savoir s’il existe d’autres métabolites de pesticides susceptibles de contaminer les eaux souterraines et l’eau potable mais qui ne sont pas encore recherchés. L’étude s'est concentrée sur 88 substances pesticides autorisées ou ayant été autorisées en France depuis 2011 et à risque de générer des métabolites mobiles. En se basant sur les dossiers d’évaluation des pesticides de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) pour ces 88 substances, Générations Futures a établi une liste des métabolites à risque de contaminer les eaux souterraines et de dépasser la norme de 0,1 µg/l pour l’eau potable. Pour déterminer si ces métabolites identifiés comme à risque sont effectivement recherchés ou non, elle a listé tous les métabolites ayant été analysés au moins une fois dans les eaux souterraines et/ou potables ces deux dernières années par les agences. En résultat : des dizaines de métabolites problématiques sont passés sous silence. Sur les 88 substances actives étudiées, 39 substances ont été identifiées, générant 79 métabolites risquant de contaminer les eaux souterraines françaises à des concentrations supérieures à 0.1 µg/L d’après l’ANSES. Les ventes en France de ces 39 substances à risque s’élevaient à 8 330 tonnes en 2021. 23 métabolites sur les 79 identifiés ont fait l’objet d’un suivi dans les eaux en 2022/2023 et 56 métabolites à risque de dépasser la norme pour l’eau potable n’ont fait l’objet d’aucun suivi dans les eaux souterraines ou l’eau potable. La pollution des eaux françaises par les métabolites de pesticides est donc potentiellement très sous-estimée, en conclut Générations Futures qui précise que 12 de ces métabolites sont particulièrement à risque, parmi lesquels le TFA (métabolite commun à de nombreux pesticides fluorés présents dans la majorité de l’eau potable en Europe et considéré par l’Allemagne comme toxique pour la reproduction probable) et également le DIPA, métabolite persistant de l’herbicide tri-allate jugé potentiellement génotoxique et dont certains usages conduisent à des concentrations dans les eaux souterraines 420 fois au-dessus de la norme pour l’eau potable. Pourquoi ces métabolites ne sont-ils pas suivis ? Pour Générations Futures il y aurait plusieurs raisons possibles : la méthodologie utilisée pour sélectionner les métabolites à suivre n’est pas pertinente. Entre autres, les propriétés intrinsèques des métabolites concernant leur capacité à persister dans les sols et à lessiver vers les eaux souterraines ne sont pas prises en compte. S’y ajoute probablement un manque de communication entre les services de l’ANSES, qui sont au courant des risques avant même la mise sur le marché des produits, et les services de la direction générale de la santé du ministère de la Santé et des agences régionales de santé chargés du contrôle sanitaire de l’eau potable. Enfin, la non mise à disposition par les industriels d’étalons analytiques pour de nombreux métabolites freine l’élargissement nécessaire des recherches des métabolites de pesticides dans l’eau. Face à ces résultats, Générations Futures d’agir immédiatement en améliorant drastiquement la surveillance des métabolites dans l’eau, en sélectionnant mieux les substances à suivre et en obligeant les industriels à fournir tous les étalons analytiques nécessaires. Afin de préserver la ressource, l’usage des pesticides dans les aires d'alimentation de captages doit être interdit rapidement. Il est nécessaire de soutenir financièrement les agriculteurs dans leur conversion vers des systèmes moins dépendants des pesticides. Communiqué (avec tous les liens) – Rapport |