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Dossier de la rédaction de H2o   |
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20/09/2012 | |
Moins de neige, une eau plus rare et aléatoire, des rivières plus basses en été : les nouvelles données du changement climatique obligent à repenser la gestion de l’eau. L’Agence de l’eau Rhône Méditerranée & Corse publie un rapport de synthèse des connaissances sur les impacts du changement climatique sur l’eau dans le grand Sud-Est français et a réuni un séminaire scientifique de 300 experts et gestionnaires de l’eau et des rivières, des collectivités et de l’État. Région la plus sensible de France au changement climatique, elle connaît déjà des situations de pénuries d’eau sur 40 % de son territoire, d’où l’urgence d’envisager des mesures d’adaptation ambitieuses. Les impacts annoncés du changement climatique – Selon les scientifiques, plusieurs faits marquants peuvent d’ores et déjà être annoncés avec certitude. Une perte de durée d’enneigement de moitié au sud des Alpes dès 2030, due à la conjonction de la diminution des chutes de neige et une accélération de leur fonte. C’est à basses et moyennes altitudes (1 200 à 1 800 mètres), dans toutes les Alpes, que le manteau neigeux sera le plus dérangé. À plus long terme (2080), un scénario pessimiste fait état d’une quasi disparition de la neige au printemps sur toutes les Alpes à basses et moyennes altitudes. Le débit des rivières en été chutera parce qu’il ne sera plus aussi bien soutenu par la longue fonte des neiges et que les sols seront plus secs. En 2050, les affluents non méditerranéens du Rhône (Saône, Loue, Ognon…) perdraient 20 à 50 % d’eau en été et en automne, et jusqu'à 75 % en été pour l’Isère et la Durance. Les fleuves du Languedoc-Roussillon pourraient perdre 30 à 80 % de débit en 2080. La Méditerranée sera la zone la plus affectée par les pertes de précipitations. Les bassins côtiers du Languedoc-Roussillon recevraient 60 % de pluies en moins l’été en 2080 avec des déficits majeurs jusqu’à - 80 % sur l’Agly, l’Aude, la Têt ou le Tech (Aude et Pyrénées-Orientales). Des sécheresses plus intenses, plus longues et plus fréquentes sont attendues partout. Pour les pluies d’automne et d’hiver, les modèles scientifiques ne s’accordent pas sur l’évolution à la baisse ou à l’augmentation, néanmoins, en bilan sur l’année, les apports d’eau seront plus faibles et plus incertains. Facteur aggravant, l’évapotranspiration s’accroissant, elle avancera en saison les manques d’eau en agriculture et les accentuera par assèchement des sols. À l’échelle du bassin Rhône-Méditerranée et Corse, les scientifiques situent la montée des températures en moyenne annuelle entre 1 et 2 °C d’ici 2030 puis de 3 à 6 °C à l’horizon 2080. Plus précisément, sur les bassins côtiers les scénarios optimistes annoncent + 3 °C d’augmentation moyenne d’ici 2080. Une pointe à + 10 °C au mois d’août est même envisagée. Les aquifères littoraux, affectés par une baisse de la recharge, pourraient être aussi menacés de salinisation due à l’élévation du niveau de la mer. En effet, il est vraisemblable que la Méditerranée montera sans qu’il soit encore possible préciser de quelle hauteur. Les poissons d’eau douce et d’eau de mer seront fortement perturbés. En trente ans, les eaux du Rhône se sont déjà réchauffées de 2 °C à son embouchure en été. Seules les cours d’eau comme l’Isère, l’Arve ou le Rhône amont pourraient être moins touchés du fait de l’influence des glaciers, tant qu’ils fondent. Les aires de répartition des poissons vont se déplacer vers le nord et en altitude. La truite fario et le chabot, notamment, verraient leur aire régresser sévèrement. La Méditerranée pourrait se réchauffer de 3 °C d’ici 2080 et s’acidifiera (pH tombant de 8,1 actuellement à 7,7 en 2100 par dilution de CO2, ce qui représente une menace pour le calcaire des coquilles). Sur 75 espèces de poissons endémiques, 50 verraient leurs habitats fragmentés ou réduits et 14 disparaitront probablement. Enfin, le littoral languedocien connaîtra des risques d’érosion et de submersion encore accrus. Ces données impressionnantes par leur rapidité font sentir la vulnérabilité de nos activités actuelles de sports d’hiver de moyenne montagne, de refroidissement industriel sur le cours du Rhône (nucléaire), d’agriculture, d’approvisionnement en eau potable et bien sûr de survie des milieux aquatiques, si rien n’est fait. Un plan d’adaptation – Ces travaux s’inscrivent dans le cadre d’un futur plan de bassin d’adaptation au changement climatique que l’agence de l’eau pilote, avec l’État et les cinq conseils régionaux de la zone, et qui sera finalisé mi-2013. Le présent rapport scientifique est soumis à consultation scientifique pendant un mois. En particulier, un comité scientifique spécial est réuni par l’agence de l’eau. Placé sous la présidence de Hervé Le Treut, directeur de l’Institut Pierre-Simon Laplace, il donnera son avis sur ces conclusions et formulera des recommandations pour guider les gestionnaires dans la mise en place de mesures d’adaptation à la hauteur de l’enjeu. Fin 2012, le plan présentera quatre cartes de vulnérabilités identifiant les zones les plus sensibles pour l’agriculture (vigne, tournesol au sud, maïs, etc.), la ressource en eau, les activités liées à la neige et la biodiversité. Elles croiseront les données de fragilités déjà perceptibles dans nos territoires et les évolutions climatiques estimées. Enfin le plan comprendra des mesures d’adaptation pour les bassins des principaux cours d’eau et servira de module réplicable dans tous les plans régionaux en cours de préparation (SRCAE, SRCE, SRADT, etc.). Ce plan est placé sous la responsabilité d’un comité directeur comptant le président du comité de bassin Rhône-Méditerranée, le préfet coordonnateur de bassin et les cinq présidents de conseils régionaux (Provence-Alpes-Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon, Rhône-Alpes, Franche-Comté, Bourgogne). L’agence de l’eau appelle à une forte implication des élus, avec l’État, pour ce travail de réinvention de l’avenir de l’agriculture, du tourisme, de l’urbanisation, de l’énergie et des milieux aquatiques.
Bilan des connaissances, version de consultation, septembre 2012 |