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Le 10 mai, l’UE est entrée en déficit écologique

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Dossier de
la rédaction de H2o
  
01/07/2019

Alors que se célébrait le 9 mai la Journée mondiale de l’Europe, les Européens s’apprêtaient à vivre à crédit dès le lendemain, le 10 mai, "Jour du dépassement européen". Cela signifie que si le monde entier vivait comme les Européens, nous aurions consommé l’ensemble des ressources naturelles que la planète peut renouveler en un an. Cette date, dévoilée par le WWF en partenariat avec le Global Footprint Network, intervient à  deux semaines des élections européennes et alors que les chefs d’États de l’Union européenne se réunissaient à Sibiu en Roumanie pour le Sommet sur l’avenir de l’UE.

Le Jour du dépassement, c’est le jour à partir duquel nous avons pêché plus de poissons, abattu plus d’arbres et cultivé plus de terres que ce que la nature ne peut nous procurer au cours d'une année. Cela marque également le moment où nos émissions de gaz à effet de serre auront été plus importantes que ce que nos océans et nos forêts ne peuvent absorber. C’est donc cette année le 10 mai que l’Union a franchi cette limite, alors que l’année n’est entamée que de cinq mois. Si toute l’humanité consommait autant de ressources que les Européens, elle utiliserait l’équivalent de 2,8 planètes Terre pour subvenir à ses besoins. Un résultat bien au-dessus de la moyenne mondiale qui se situe autour de 1,7 Terre. En effet, alors que la population de l’UE ne représente que 7 % de la population mondiale, les Européens utilisent à eux seuls 20 % de la biocapacité de la Terre. Le Jour du dépassement européen a dramatiquement avancé dans l’année ces dernières décennies, passant du 13 octobre en 1961 au 10 mai cette année. Au sein de l’Union, il existe des différences notables : le Luxembourg atteint son jour du dépassement après seulement 46 jours (la date très précoce s’explique principalement par l’empreinte carbone élevée  du Luxembourg, due aux faibles taxes sur les carburants qui attirent les automobilistes des régions avoisinantes pour faire le plein d’essence), tandis que la Roumanie a consommé toutes les ressources pour l’année entière au bout de 192 jours – plus tôt que la moyenne mondiale cependant, qui était le 1er août en 2018.

La dette écologique a un impact sur notre planète, sur notre économie et notre santé. C’est un constat sans appel : si la planète était une entreprise, elle serait au bord de la faillite. L’érosion du capital naturel et ses conséquences directes ou indirectes (chute des stocks de poissons, érosion des sols, pollutions, extinctions d’espèces et dérèglement climatique) ont un coût important, à la fois pour l’économie et notre santé : les événements climatiques extrêmes ont coûté 450 milliards d’euros à l’Europe depuis 1980 et la pollution de l’air cause 430 000 morts prématurées en Europe chaque année. Agir pour le climat et l’environnement, c’est aussi œuvrer pour le bien-être et la qualité de vie des citoyens européens. Le WWF a choisi de mettre l’accent sur le Jour du dépassement européen au moment où les citoyens étaient invités à voter pour leurs représentants au Parlement européen. Pour nous amener vers une neutralité carbone, protéger la nature et inverser la courbe de la perte de la biodiversité à la fois en Europe et dans le monde, ils devront prendre dans les années à venir des décisions ambitieuses. Pour cela, les Objectifs de développement durable des Nations unies fournissent un cadre essentiel. Le document de réflexion "Vers une Europe soutenable à l’horizon 2030" de la Commission européenne suggère l’adoption par l’Union européenne d’une stratégie globale dans laquelle les ODD guideraient toutes les actions de l’UE et de ses États membres. L’Union européenne s’assurerait ainsi que sa politique n’aille pas à l’encontre de ses engagements de développement durable. L’UE et de ses États membres ont l’opportunité de réduire leur empreinte écologique en choisissant de mettre en œuvre les priorités et politiques adaptées. C’est pourquoi le WWF appelle les représentants politiques et les décideurs européens à prendre les mesures suivantes afin d’atteindre nos engagements internationaux : pour un système agricole et alimentaire durable, le WWF demande l’adoption d’une politique agricole commune qui préserve les ressources naturelles, favorise l’emploi agricole et protège les agriculteurs des fluctuations des marchés internationaux ; le développement de mesures législatives pour répondre à l’impact environnemental européen au-delà de ses frontières, grâce à l’adoption d’un plan d’action contre la déforestation, la dégradation des forêts et la conversion des écosystèmes naturels. Le WWF demande la mise en œuvre de l’Accord de Paris afin de maintenir la hausse des températures à 1,5 °C, notamment via l’engagement d’atteindre zéro émission nette d’ici 2040 via le développement et la mise en œuvre d’un cadre législatif adapté. Aussi, de revoir à la hausse les objectifs Climat et Énergie de l’Union européenne pour 2030, en accord avec cette ambition et afin de réussir la transition vers 100% d’énergies renouvelables. Le WWF attend des décideurs politiques européens qu’ils soient des leaders mondiaux dans l’adoption d’un New Deal pour la Nature en 2020 qui renforce les objectifs mondiaux et les mécanismes pour mettre un terme à la destruction de la nature d’ici 2030. Cela passe par la mise en œuvre du cadre légal européen existant sur la protection des habitats, des espèces et des écosystèmes d’eau douce dans l’Union européenne. Le WWF demande l’allocation de 1 % du budget européen pour la biodiversité via le programme Life de la Commission européenne. Pour protéger nos océans, il est crucial d’adopter et de mettre en œuvre des règles de contrôle et de suivi afin d’assurer que toutes les activités de pêche menées par les flottes européennes et que tous les produits de la mer entrant sur le marché européen soient légaux et issus d’une pêche durable. Enfin, le WWF demande qu’au moins 50 % du budget européen soit consacré aux économies bleue et verte, en ligne avec l’objectif de l’Accord de Paris ; et la garantie que le reste du budget ne soit pas alloué à des initiatives néfastes pour le climat ou l’environnement.

Alors que les décideurs définissaient le 9 mai un nouveau programme stratégique pour guider les orientations de l’Union européenne durant les cinq prochaines années, le WWF a appelé à un pacte de soutenabilité européen. Il s'agirait de mettre dans l'agenda stratégique européen et le futur mandat de la Commission les mesures suivantes : l'intégration de la soutenabilité dans les priorités stratégiques relatives à la sécurité (notamment le dérèglement climatique et la perte de biodiversité), à la compétitivité (via les investissements verts) et au rôle de l'Union européenne sur la scène mondiale à travers la diminution de l'empreinte écologique de l'Union européenne et de sa dépendance à l'importation de ressources naturelles ; une vision forte de la soutenabilité. Portée au plus haut niveau, celui des chefs d'État et de gouvernement, elle passe par la reconnaissance de l'Agenda 2030 pour le développement durable comme principe directeur de toutes les politiques et actions européennes. L’objectif zéro émission nette d’ici 2040 doit faire partie de cette équation vers la durabilité ; un rôle leader de l'Union européenne et des chefs d'État et de gouvernement européens pour obtenir un accord ambitieux en 2020 pour enrayer la perte de biodiversité.

WWF