Autres catégories
Recherche |
Dossier de la rédaction de H2o   |
||
31/10/2024 | ||
Après plus de 15 ans sans le moindre signe, l’énigmatique saumon-carpe géant du Mékong, surnommé "le fantôme du Mékong", refait surface, mettant fin au débat sur son extinction. Une équipe internationale de scientifiques, impliquant Sébastien Brosse, enseignant-chercheur à l’Université Toulouse III – Paul Sabatier au sein du Centre de recherche sur la biodiversité et l’environnement (CRBE – CNRS/IRD/Toulouse INP/UT3), vient de révéler que trois nouveaux individus de cette espèce ont été capturés entre 2020 et 2023. Ces résultats ont été publiés dans Biological Conservation le 13 octobre et soulignent la nécessité de s’appuyer sur des méthodes innovantes d’inventaire de biodiversité pour développer des plans de conservation ambitieux. Comme l’esturgeon, le silure ou l’arapaïma, le saumon-carpe géant (Aaptosyax grypus) fait partie des plus grands poissons d’eau douce du globe, que l’on regroupe sous le terme de méga-poissons. Pourtant, malgré sa grande taille (jusqu’à 1 m 30 et 30 kg) ce poisson, qui n’habite que le fleuve Mékong et ses affluents, est particulièrement rare et insaisissable. Il n’a été scientifiquement nommé qu’en 1991, et en tout et pour tout, moins de 30 individus ont été recensés. De plus, aucun spécimen n’ayant été rencontré depuis 2005, l’espèce était considérée comme probablement éteinte. Cette hypothèse s’est récemment révélée fausse suite à la capture de trois individus adultes entre 2020 et 2023, confirmant donc que ce poisson peuple toujours les eaux du Mékong. Fait surprenant, ces trois spécimens ont été capturés au Cambodge, loin de la zone où l'on pensait que l'espèce se trouvait. "Cela laisse penser que l’aire de distribution de ce poisson est plus large que ce le l’on croyait auparavant" estime Sébastien Brosse, qui reste prudent quant au potentiel de survie de l’espèce. Pour mieux connaître cette espèce, les scientifiques proposent de s’appuyer sur des méthodes non-invasives d’inventaires de biodiversité, comme la collecte de l’ADN que libèrent ces animaux dans l’environnement en renouvelant leurs cellules, ainsi que dans leurs excréments, urine ou mucus. Cet ADN environnemental peut être collecté par une simple filtration de quelques dizaines de litres de l’eau du fleuve, permettant ainsi de détecter les organismes vivant dans le milieu. La méthode permettrait de mieux cibler la distribution actuelle du saumon-carpe géant sans nécessité d’observer ou de capturer des spécimens. En photo, l’un des trois individus de saumon-carpe géant capturés dans le Mékong cambodgien en 2022. Ce poisson, probablement un jeune adulte (88 cm et 6 kg) a été capturé par des pêcheurs locaux qui ont informé les scientifiques de cette capture exceptionnelle. Photo Chheana Chhut. |